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Robert Dubarry – La figure de proue de l’Association Baptiste

Robert Dubarry (1875 – 1970)

La figure de proue de l’Association Baptiste

 

1 – Le « poulain » de Ruben Saillens :

Robert Joachim Dubarry naît en 1875 dans une famille modeste du quartier des Ternes dans le nord-ouest parisien. A l’âge de six ans, il perd son père. Sa première école est une école méthodiste où son maître Avit Maillet a sur lui une influence déterminante. Il est donc dès l’enfance en proximité de la mouvance évangélique. Il suit ensuite une formation commerciale. A l’âge de 15 ans, il se convertit à Jésus-Christ, très vraisemblablement lors d’une réunion tenue par le célèbre prédicateur Ruben Saillens (dont vous pouvez lire la biographie ici), alors pasteur baptiste d’une Église installée à proximité des Grands Boulevards (c’est aussi sur la rive droite, mais pas du tout dans le même quartier de Paris). Il reçoit le baptême par Ruben Saillens le 8 mai 1892. L’Église est jeune et dynamique (elle a été fondée en 1889 par Ruben Saillens, auparavant évangéliste phare de la Mission Populaire, dite « Mission MacAll », pour permettre aux convertis qui jusqu’alors ne disposaient pas d’un encadrement ecclésiastique spécifique, de bénéficier des conditions normales d’exercice du culte et de croissance spirituelle dans un cadre reflétant la sensibilité du prédicateur qui les avait convaincus). Mais cette Église va passer en cette même année 1892, quelques mois plus tard, par une grave crise.

En effet, Ruben Saillens est alors invité par les Missions Américaines (qui soutiennent – et subventionnent largement à l’époque – le baptisme français) pour une vaste tournée de collecte de fonds. Une absence de trois mois, pour un voyage couronné d’un large succès financier, mais qui suffit pour qu’au sein de l’Église de manifestent envies et divisions, au point qu’un des pasteurs, au retour, revendique pour lui une partie des fidèles. Se déchaîne alors contre le couple Saillens une violente campagne de calomnies injurieuses de plusieurs années, comportant des manœuvres de harcèlement, dans laquelle heureusement ils continuent de jouir du soutien tant du Comité d’Église que des membres fidèles. Pareille crise était de nature à ébranler la confiance d’un jeune homme plus affermi que ne l’était Robert Dubarry : le fait est qu’il n’en fut rien. En réalité, à cette époque il suit deux ans les cours de l’École Baptiste de Paris.

Encouragé dans sa vocation pastorale par son maître, il fait choix pour une formation pastorale (dont Ruben Saillens lui-même avait toujours déploré en ce qui le concernait  lui-même la fragilité), du cadre anglo-saxon qui offrait les larges possibilités qui n’existaient pas encore en France, et, en Angleterre, de l’Institut qui avait les plus grandes faveurs aux yeux de Ruben Saillens,  le Pastor’s College de Charles-Haddon Spurgeon, (surnommé le « prince des prédicateurs »), calviniste d’une tendance théologique peu suspecte de complaisance envers le libéralisme, mais baptiste sur le tard (sur la question du baptême !). Robert y acquiert, de 1894 à 1896, (mais non de Spurgeon lui-même, disparu en 1892) une solide formation théologique, pastorale et pratique, mais aussi une grande aisance dans le maniement de la langue anglaise qui s’avérera plus tard, nous le verrons, extrêmement utile. Il y rencontre aussi un autre étudiant, Arthur Blocher (le futur pasteur de l’Église du Tabernacle de Paris, qu’il conduit aux vues baptistes : entre les deux jeunes hommes se développe alors une solide amitié.

De 1896 à 1898, il fait son service militaire à Nancy. Il y est accueilli, toujours dans le même esprit, par la Communauté Nazaréenne de cette ville, présidée par Georges Diebold. Les Nazaréens étaient une dissidence des Mennonites datant des débuts du XIX° siècle, fondée par un certain Samuel Frölich, mais qui allait devenir plus tard explicitement baptiste. C’est probablement là, en tout cas en 1896, qu’il fait la connaissance de Georges Guyot, début d’une longue amitié liée dès les premiers moments qui ne fit que se renforcer au cours des années, et devait faire de lui son plus fidèle collaborateur. A cette époque aussi il se marie avec une demoiselle E. Pichon. Libéré du service militaire, il est embauché comme secrétaire particulier du Maire de Nancy, pour un salaire qui à vrai dire ne lui permet de vivre que modestement. En revanche, il ne doit que trois heures de travail par jour, ce qui lui permet de se consacrer le reste du temps à l’Église de la rue de Meslay à Paris, sous l’égide de Ruben Saillens

2 – Le collaborateur étroit de Ruben Saillens :

Nommé pasteur à Nîmes, où il entame un très long ministère auquel il consacrera la plus grande part de sa vie, c’est en  grande partie à distance et à la faveur de rencontres pastorales  ou de congrès internationaux dans les pays anglo-saxons qu’il devient le collaborateur de Ruben Saillens. La stabilité tranquille du disciple compense quelque peu le bouillonnement assez tumultueux et parfois brouillon à cette période de son auguste aîné.

Ainsi en 1904, Ruben Saillens, qui s’est entre-temps détaché de son combat pour la cause baptiste, en se recentrant sur l’effort pour rallier les biblicistes, ce qui le conduit à rechercher des alliances dans les Églises de Suisse Romande, s’assure de la collaboration de Robert Dubarry lorsqu’il prend la tête d’une Association franco-suisse qu’il fonde à cet effet,  en l’appelant à ce comité. Dans le même temps on commence à parler en France du Réveil du Pays de Galles, et Saillens ne va pas tarder, l’année suivante, suite à un voyage entrepris sur place, à entamer une série de tournées dans toute la France, mais aussi en Suisse Romande, pour prêcher le Réveil, et la structure de l’Association fournit tout naturellement un cadre approprié pour les organiser. Tout naturellement aussi, en route pour une tournée en  Algérie, il fait une étape d’une semaine de prédications richement bénies à Nîmes, où Robert Dubarry est pasteur.

Autre projet brusquement impulsé par Ruben Saillens depuis 1906  auquel Robert Dubarry au Comité de l’Association franco-suisse se trouve naturellement étroitement associé, celui des Conventions chrétiennes sur le modèle anglo-saxon (Keswick, Northfield). Là encore, il s’agit de rallier les biblicistes en offrant l’occasion de rencontres périodiques à l’échelle franco-suisse pour permettre, via des Cours Bibliques et des Conférences,  approfondissement et ressourcement, choses difficilement réalisables à l’échelon des Église locales, jeunes et inexpérimentées en tous cas en France. Là encore c’est la Suisse Romande, terre d’implantation protestante beaucoup plus favorable que la France, qui présente le cadre approprié, et la collaboration de l’Association franco-suisse sous la vice-présidence de Robert Dubarry qui prend toute sa valeur pour organiser des Conventions, d’abord à Chexbres, près de Lausanne, puis à Morges.

C’est toujours dans la sphère d’action de Ruben Saillens, mais non en rapport direct avec lui, qu’il est appelé à arbitrer en tant que médiateur le conflit qui éclate en 1905 entre l’Église baptiste de la rue Meslay et son annexe de Colombes. Avant d’entamer ses tournées de prédication sur le Réveil, Ruben Saillens, en accord avec le Comité des Missions baptistes dont il dépendait, avait transmis la responsabilité de l’Église baptiste qu’il avait fondée, celle même où Robert Dubarry avait été baptisé, à son suffragant, qui était aussi son gendre (ayant épousé sa fille Madeleine), Arthur Blocher.  L’existence de l’annexe de Colombes était déjà ancienne, datant d’avant la crise de 1892 (voir plus haut). Marguerite Warguenau-Saillens en évoque les premières réunions qui se seraient tenues dans un café dont la gérante s’était convertie.  Mais elle omet de mentionner à ce sujet le rôle d’Emile Raynaud. Celui-ci, né à Mazamet en 1866 dans une famille huguenote, avait d’abord travaillé pendant 17 ans pour l’Armée du Salut avant d’acquérir des convictions baptistes qui le conduisirent à entreprendre de fonder, sur ces bases, une Église à Colombes. Que la première initiative revînt à l’Eglise parisienne, ou que celle-ci n’ait fourni qu’un appui certes déterminant, à Emile Raynaud, Sébastien Fath déclare à propos de ce dernier « qu’il conduisit avec autorité l’Eglise baptiste de Colombes d’abord annexe de l’Eglise baptiste de la rue Meslay, puis indépendante ». Au moment donc de la transmission de l’Eglise fondée par Ruben Saillens à la responsabilité d’Arthur Blocher, l’Eglise de Colombes estime le moment venu de prendre son indépendance et c’est pour régler ce différend que la médiation de  Robert Dubarry est sollicitée. Celui-ci est en cette affaire dans un rôle qui convient parfaitement à son tempérament porté à la conciliation.  L’Église de Colombes devient donc  indépendante l’année suivante en 1907.

En 1912, la tente géante achetée à l’initiative de Ruben Saillens pour l’évangélisation du grand Paris est transportée à Nîmes pour une longue campagne de 6 semaines qui porte des fruits abondants : voilà qui illustre encore la collaboration étroite du grand évangéliste avec son parèdre nîmois.

L’année suivante, dans le climat de suspicion réciproque entre Ruben Saillens et Philémon Vincent périodiquement ranimé, une querelle assez subalterne (des propos de Philémon Vincent tenus en privé et mettant en cause Ruben Saillens, maladroitement rapportés et amplifiés par une traduction exempte de nuances, et que Philémon Vincent ne daigna pas démentir) s’envenima au point de provoquer la démission de Ruben Saillens de la présidence de l’Association Franco-Suisse au bénéfice de son second, Robert Dubarry. L’interprétation favorable de ce fait est que Ruben Saillens laissa l’Association entre les meilleures mains possibles, celles de son fidèle alter ego et étroit collaborateur. Mais une interprétation plus critique, qui devait se valider quelques années plus tard, est que ce faisant, il larguait les amarres du baptisme, abandonnant au profit, pour lui-même et son « clan », (sa famille et l’Église qu’il avait fondée), d’une perspective d’Eglise strictement locale, tout ancrage, qu’il soit fédératif ou associatif, dans le mouvement baptiste français en tant qu’ensemble, et ce sera tant pis pour Robert Dubarry.

Cela nous conduit au seuil de la Première Guerre Mondiale où l’association des deux hommes prend un tour inattendu. La famille Saillens est en effet surprise par la déclaration de guerre à Chalons-sur-Marne au mariage de leur plus jeune fils. Ne pouvant de ce fait se rendre en Suisse où ils sont attendus, les Saillens  (le couple et les dames dont les maris sont au combat) se replient sur le midi, et c’est à Nîmes qu’ils sont accueillis par Robert Dubarry. Une fidèle de l’Église met à leur disposition un « mazet », une fermette nîmoise des plus rustiques, mais au calme, et la collaboration dans le cadre proprement nîmois se fait plus étroite que jamais (réunions d’étude biblique, de jeunes filles et de dames, campagnes d’évangélisation, prédications du pasteur Saillens… ). Cela n’exclut pas une assez intense activité extérieure, au moins en ce qui concerne Ruben Saillens  (prédications, à son Saint-Jean-du-Gard natal, non loin de là, mais aussi  et surtout en Suisse pour les Conventions, à Paris, en Angleterre, et même en 1918 aux Etats-Unis.

3 – Le pasteur nîmois :

Quand Robert Dubarry s’ installa à Nîmes fin 1901,(il avait alors 26 ans), l’Église, toute récente(1895) ne comptait que quatre membres, pasteur (Joël Carlier) compris, qui se réunissaient dans un magasin. Des rivalités internes, reflet de conflits inter-protestants, avaient déjà failli mettre fin à la présence baptiste dans la ville, comme cela était le cas à Alès, où l’Eglise, née en 1896, et qui en 1898 comptait déjà 36 membres, s’effilochait déjà avant de disparaître. Sans tarder, Robert Dubarry entama la réorganisation de l’Eglise, prenant un option qui s’avéra judicieuse : au lieu d’aller, comme c’était trop souvent le cas dans la région à la « pêche aux protestants » en rupture de ban, il recruta de préférence chez les catholiques non pratiquants, ou même les gens sans religion, mettant l’accent sur la formation des nouveaux auditeurs. Mais les débuts furent bien difficiles, et la première nouvelle auditrice régulière ne vint que 3 ans plus tard. Dans ces efforts persévérants, l’épouse de Robert Dubarry, qui était une femme discrète, apporta une aide précieuse.

A deux reprises, en 1903, puis en 1907, l’Église déménagea pour des locaux plus conséquents, signe d’une croissance régulière  En 1905, l’auditoire ne comptait encore que moins de vingt personnes.  Mais naturellement ,  l’aide, à plusieurs reprises, des campagnes de Ruben Saillens signalées plus haut, aida au développement numérique. Elle atteint 55 membres en 1914, pour frôler la centaine en 1920.

Dans son ministère à Nîmes, Robert Dubarry fut aidé par de fidèles collaborateurs, parmi lesquels il faut citer les frères Louis et Fernand Bonijoly, ainsi que, pendant la période de 1923 à 1977 (qui va donc au-delà du décès de Robert Dubarry), du couple Frédéric Jalaguier. Robert Dubarry eut aussi la joie de voir un jeune de l’église, Albert Solanas, s’y consacrer et s’y engager comme pasteur, en 1966.

Durant les 65 ans de pastorat à Nîmes, les baptistes nîmois passèrent de douze à 200 membres.

4 –  La mutation fondamentaliste :

Le mouvement évangélique naît, en France comme dans le monde (entendons : le monde européo-nord-américain),  en réaction à la remise en cause, de par le rationalisme, qui conduit à une critique des textes bibliques et s’écarte du respect de l’autorité de la Bible en tant que critère de la Vérité révélée. On peut se reporter à ce sujet, dans la présente rubrique et dans la biographie d’Henri Pyt (que vous pouvez lire ici), au chapitre consacré au Réveil de Genève. Dans le cas dudit Réveil, c’est l’intransigeance des pasteurs de Genève, qui entendent imposer une lecture extrêmement édulcorée d’une Bible expurgée de l’acuité de son message et réduite à un vague moralisme,  qui conduit de jeunes étudiants de la Bible avides de renouveau à prendre leurs distances avec l’Église officielle, puis, souvent à contrecœur, à fonder des Églises libres où ils ont la faculté de prêcher et de vivre leur foi selon leurs convictions.

De fait,  des  mouvements radicaux séparatistes se manifestent dès le début au sein des revivalistes, (comme celui des Frères, bientôt qualifiés « d’étroits », sous la conduite de Nelson Darby), mais ils restent minoritaires, soit que les revivalistes gardent l’espoir de convaincre les Églises officielles de les rejoindre, soit que, extrêmement minoritaires qu’ils se sentent, ils entendent compenser leur faiblesse numérique en regroupant le plus largement possible les bonnes volontés dispersées  dans une poussière de chapelles et mouvements divers nés ici et là au fil des accidents de l’histoire, et dont les membres sont soucieux de propager le même message de l’évangile. On l’a constaté maintes fois dans ces notices consacrées  aux hommes des origines du mouvement évangélique, l’évangélisation surtout en France est conçue par eux sur une base trans-dénominationnelle ou interecclésiastique. L’appui de pasteurs de l’Église Réformée, elle-même bien minoritaire, n’est pas dédaigné : même des pasteurs libéraux dont les prédications intellectualisantes et « modernistes » ont vidé les églises, ne répugnent pas au concours que peut apporter un prédicateur évangélique en vue qui ramènera dans leurs murs une audience dont ils ont perdu l’habitude. On a vu qu’Henri Pyt, par exemple, évitait soigneusement de se présenter comme baptiste,  (il était au service d’une société interconfessionnelle) et on raconte qu’il a fallu que les convertis de Nomain lui tendent un piège pour qu’il consente à leur accorder le baptême.  Ruben Saillens lui-même, dont le souci de pureté évangélique ne fait aucun doute, porte longtemps une étiquette interconfessionnelle (dans les UCJG puis comme missionnaire MacAll) que son beau-père Jean-Baptiste Crétin, pourtant baptiste étroit, l’encourage à conserver et dont il ne se départit pas volontiers.

Mais au plan mondial le vent a déjà tourné à cette charnière du XIX° et du XX° siècle. Aux États-Unis, alors qu’un mouvement œcuménique commence à faire parler de lui (en France c’est plus difficile car l’Église catholique majoritaire y est encore à cette date violemment opposée), en réaction sur le plan théologique se constitue le mouvement fondamentaliste, qui prône le retour aux « fondamentaux » de la foi chrétienne, c’est-à-dire aux doctrines fondamentales de la Réforme, en particulier au respect sourcilleux de l’autorité absolue de la Bible comme source de la Vérité. Ce courant va largement infuser et irriguer le mouvement évangélique, aux États-Unis d’abord, puis dans le monde entier. Et l’un des principes de base du fondamentalisme est un séparatisme strict, qui interdit toute collaboration avec des Églises qui ne reconnaissent pas absolument ces « fondamentaux », c’est-à-dire au premier chef celles qui ont une lecture rationaliste de la Bible, et même celles qui les tolèrent. Ils brandissent le verset  17 du chapitre 6 de la 2° Lettre aux Corinthiens, lui-même citant Ezéchiel : « Sortez du milieu d’eux !  Séparez-vous, dit le Seigneur ! N’ayez pas de contact avec ce qui est impur, alors je vous accueillerai. ». Très schématiquement, les Églises baptistes du nord-est des Etats-Unis, celles qui soutiennent financièrement le mouvement baptiste français depuis ses débuts, bien que touchées par le fondamentalisme, restent  traditionnellement attachées à une unité du mouvement baptiste qui dès longtemps a fait sa place à un baptisme « large », mais le baptisme du sud, celui de la « Bible belt », profondément marqué par le revivalisme américain, a été largement gagné au fondamentalisme.

Dans le baptisme français, le débat sur le séparatisme préexistait  avec une hystérisation au moins depuis la fin du XIX° siècle, plus précisément depuis 1892 (l’année même du baptême de Robert Dubarry !), emblèmatisée par le débat qui opposait Philémon Vincent, à la tête de l’Association baptiste (la future Fédération) et Ruben  Saillens. On peut se reporter, dans la présente rubrique, à la biographie de Ruben Saillens (ici) et particulièrement  au chapitre intitulé « Une dissension regrettable et un échec  dans la réorganisation du baptisme en France ». On y verra comment Ruben Saillens, sensibilisé dès l’enfance aux dangers du laxisme théologique,  a profité à plein de la liberté religieuse nouvelle suite à la chute du Second Empire pour se lancer à corps perdu dans la prédication sur une base inter-ecclésiastique, pensant sortir le mouvement évangélique de son ghetto ultra-minoritaire, pour découvrir bientôt qu’une foi qui n’est pas confortée par l’entourage régulier d’une Église fidèle à l’Évangile, nourrie d’une exigence d’approfondissement et d’un contact quotidien avec la Bible, ne tient pas la route. L’expérience de  pastorat baptiste qu’il est conduit à entreprendre alors lui fait toucher du doigt que le baptisme français ne repousse pas absolument le ver dans le fruit de l’Évangile que représente une théologie ambiguë, et donc que le ralliement des revivalistes et des biblicistes lui paraît un préalable pour sauver le mouvement évangélique,  et il se rapproche inéluctablement du séparatisme qui était dans son ADN originel. En fait le débat est resté ouvert au début du XX° siècle Première Guerre Mondiale comprise, mais c’est à l’issue de cette conflagration, avec les terribles destructions qu’elle a entraînées dans les terres du Nord qui sont les terres originelles du baptisme français, que l’heure est venue d’une clarification, d’une réorganisation du baptisme qui ne pouvait plus être différés. Si j’ai pris la peine  de ce long excursus, c’est à cause de la position originale, et fort inconfortable, que Robert Dubarry a été amené à prendre dans ce débat, et qui aurait risqué d’être peu compréhensible sans ce tableau d’ensemble.

5 – Des Congrès baptistes de 1920 et 1921 à la création de l’Association baptiste (AEEBF) :

A l’issue du Conflit Mondial les baptistes américains fournirent  une aide considérable à la reconstruction (elle s’imposait : en Picardie comme dans le Nord les temples étaient tous soit en ruines soit partiellement détruits dans des villes rasées, les communautés décimées ou dispersées…). Par ailleurs,  la Fédération des Églises Baptistes du Nord, dès le début de la guerre, avait demandé son adhésion à la toute nouvelle Fédération Protestante de France (l’Association Baptiste franco-suisse pour sa part s’était abstenue d’une telle démarche).  Les baptistes américains du nord, tout en s’interdisant, du moins directement, de rien imposer à leurs homologues français, en fait poussaient non sans quelque paternalisme à l’union. Depuis longtemps en France on a tendance à considérer le baptisme français comme un simple prolongement du baptisme anglo-saxon : l’exemple de la crise du baptisme français en ces années d’après-guerre suffit à démontrer combien cette vue est fausse.

Préparé plutôt hâtivement, le Congrès convoqué à Paris au temple de la rue de Lille fin juillet 1920 devait discuter, entre autres objets, d’un point resté litigieux depuis des années, celui d’une école de théologie commune au mouvement baptiste français. Le comité permanent de l’Union Baptiste était d’accord sur le principe d’une école fondée sur une base strictement évangélique. On fit le choix malheureux d’un débat non préparé, qui radicalisa les positions respectives. Les débats s’ouvrirent  dans une atmosphère apaisée semblait-il. Mais bientôt le ton changea. La prise de parole d’Henri Andru, qui voulait appeler à l’unité tout en excluant l’uniformité, obtint l’effet inverse de celui recherché, en paraissant viser l’Association franco-suisse, à tort, car celle-ci n’avait aucune visée hégémonique. Ensuite, c’est Madeleine Blocher-Saillens, la fille de Ruben, déléguée de l’Église installée rue de Lille depuis 1910, donc celle fondée par son père, qui mit le feu aux poudres  par ses questions à l’assemblée des délégués sur la teneur précise de la théologie qui serait enseignée dans l’école de formation qu’on s’apprêtait à fonder. Le lendemain, Arthur Blocher annonça la sortie unilatérale  de l’Église de la rue de Lille de l’Union Baptiste, et maintint sa décision en dépit des nombreuses sollicitations à rejoindre l’Union et pressions. Dans ce processus, à ma connaissance, Robert Dubarry, président en titre de l’Association franco-suisse, dont cette Église constituait pourtant le plus beau fleuron, ne fut ni consulté, ni même informé.

En fait, de par sa personnalité paisible et portée à la conciliation, ce dernier était loin de partager la sensibilité intransigeante et séparatiste qui prévalait dans l’entourage de Ruben Saillens. Il crut possible de sauver l’Union, en tous cas il s’abstint de suivre Arthur Blocher dans sa sécession. Peut-être jugea-t-il que le soutien qu’elle pouvait apporter aux autres Églises françaises de l’Association, pour la plupart jeunes et encore fragiles, était nécessaire.  En fait, sa modération ne lui rapporta, de la part du camp Saillens – Blocher, que critiques et suspicions. On lui prêta des motivations bassement intéressées, (on le soupçonna d’avoir tenté de « récupérer»  l’Union à son profit et ensuite de ne l’avoir quittée que suite à l’échec de la manœuvre),   et la fidèle amitié qui avait lié Ruben Saillens et lui depuis si longtemps connut brusquement un refroidissement définitif. Du reste, Madeleine Blocher-Saillens et sa mère, d’un caractère très affirmé, n’appréciaient guère les dispositions à la diplomatie de Robert Dubarry.

Du coup, Robert Dubarry  apparaissait, paradoxalement du fait de sa position en porte-à-faux, (bien qu’appartenant au camp des baptistes « stricts », il était soudain taxé par eux de tiédeur) comme le seul qui pût sauver l’Union. Il s’agissait de sonder d’une part les Églises de l’Association Baptiste franco-belge et d’évaluer les tendances du baptisme américain (au Comité puis à la tête de l’Association franco-suisse, il était depuis longtemps rompu aux échanges avec les baptistes anglo-saxons). Il exécuta donc fin 1920, une tournée approfondie des Églises de l’Association franco-belge. Il en tira des conclusions plutôt rassurantes (les baptistes du nord étaient selon lui « enseignés fort évangéliquement »), tout en s’alarmant de ce que certains conducteurs et laïcs influents « inclinaient vers une politique d’élargissement doctrinal ». Celles en revanche qu’il retira de son voyage aux Etats-Unis (à cheval sur fin 1920 et janvier 1921),  furent plus alarmistes : les progrès du « modernisme américain » étaient certes  contenus par une majorité favorable aux doctrines baptistes traditionnelles en matière d’autorité de la Bible, mais ils se marquaient sur le plan missionnaire, par un déclin des « doctrines évangéliques » au profit de « l’aspect social, au détriment de l’action spirituelle ». Ce constat confirmait les progrès des idées de théologiens comme Walter Rauschenbush, apôtre du « Christianisme social », qui étaient fort en faveur, en France,  dans certaines Églises de l’Association franco-belge. Dans le même temps, Philémon Vincent parut suggérer auprès des Américains l’idée que  la véritable raison du retrait d’Arthur Blocher, était à rechercher dans les questions de personnes, domaine dans lequel les responsabilités d’Arthur Blocher apparaissaient écrasantes.

Le congrès de mai 1921 ne fit que sanctionner, au mécontentement des Américains, la restructuration du baptisme français en trois tendances distinctes :

  • La Fédération des Églises Évangéliques Baptistes de France (FEEBF), rattachée à la Fédération Protestante (et à l’Alliance Baptiste Mondiale), favorable à un œcuménisme tempéré, et marquée par un certain pluralisme doctrinal sur la base d’une ferme identité évangélique et baptiste.
  • L’Église baptiste parisienne jusque- là située rue de Lille (le futur Tabernacle), représentant le baptisme indépendant centré sur l’Église locale au nom des exigences sans compromis du combat de la foi, défendant l’héritage de Ruben Saillens (une grande fermeté doctrinale non dépourvue d’une attirance pour le travail interconfessionnel, mais sur une base évangélique très affirmée)
  • L’Association des Églises Évangéliques Baptistes de langue Française (AEEBF), constituée d’abord officieusement dès juillet 1921, représente au départ une dizaine d’Églises issues de l’Association franco-suisse, aux options très voisines du courant précédent, derrière Robert Dubarry, et Georges Guyot , qui quittaient à leur tour l’Union Baptiste. Cette tendance était opposée à l’œcuménisme institutionnel, et doctrinalement moins pluraliste que la FEEBF.

 

A la dissolution de l’Union Baptiste, les Baptistes américains répondirent en réservant  désormais l’exclusivité de leur aide matérielle à la seule Fédération, seule exempte à leurs yeux du péché de séparatisme.)

 

6 – Les débuts difficiles de  l’Association baptiste (1921 – 1939):

 

Le Congrès de Montbéliard officialise la création de l’Association des Églises Évangéliques Baptistes de langue Française (AEEBF) en 1923, sous la conduite, particulièrement, de Robert Dubarry.

Celui-ci avait été préparé aux responsabilités de direction par sa collaboration étroite avec Ruben Saillens. Il était doté d’un caractère posé, bienveillant et ouvert, mais surtout d’une forte capacité de travail, d’une ténacité souriante et d’une puissante capacité de conviction. Il développa un réel talent d’organisateur : il pouvait aussi bien mener les inlassables discussions nécessaires à l’harmonisation des points de vue qu’emporter la conviction par des harangues enflammées ; se prêter aux obscurs travaux de dossier qu’aux articles d’édification dans la presse baptiste. Comme Ruben Saillens disciple de Victor Hugo, il avait une prédilection pour l’art oratoire, pour la phrase à la fois enthousiaste et précise, pour les images qui savent parler à l’âme. Il ne fallait rien de moins que ces qualités, maniées tant avec fermeté qu’avec diplomatie, pour assurer la survie de l’Association.

C’est que, privée de subsides au profit de la FEEBF, l’Association ne pouvait pas davantage se tourner vers les fondamentalistes américains pourvoyeurs habituels de l’aide au baptisme français, voie où Ruben Saillens ainsi qu’Arthur Blocher l’avaient précédée,  recueillant l’exclusivité de l’aide accordée, qui fut considérable. En ces mêmes années des débuts de l’Association, l’Église d’Arthur Blocher construisait dans le XVIII° arrondissement de Paris le Temple du Tabernacle. De son côté, Ruben Saillens, au profit d’une œuvre qui dépassait le cadre baptiste, finançait grâce aux fonds fournis par les États-Unis, sans difficulté,  sinon sans angoisses, l’achat de ce qui devait être l’Institut Biblique de Nogent. Robert Dubarry  pouvait bien arguer que l’Association elle aussi était sur des bases fondamentalistes, il n’avait rompu avec l’Union Baptiste qu’avec un an de retard sur Arthur Blocher, et il n’était donc pas difficile de le faire passer pour moins fondamentaliste que lui. Incontestablement, l’Association se retrouvait, sans l’avoir aucunement voulu, entre l’arbre et l’écorce où le proverbe dit bien qu’il faut éviter de mettre le doigt. Le défi était presque insoluble : comment faire vivre des Églises sans pouvoir rémunérer les pasteurs ? Comment conduire une Association, avec la presse qui en assure la cohésion (le Lien Fraternel) sans moyens financiers ? Il fallut, par nécessité impérative, faire l’expérience fondatrice de la marche par la foi dans une extrême précarité.

Dans ces circonstances, où il s’agissait de constituer à partir de rien un réseau extérieur de soutien pour l’œuvre qu’il avait fondée, l’expérience acquise aux côtés de Ruben Saillens des rencontres baptistes internationales, les contacts qu’il avait pu prendre avec d’importantes personnalités baptistes, et surtout  son excellente pratique de la langue anglaise furent pour Robert Dubarry des atouts décisifs. Après des débuts tâtonnants (une tentative sans suite de prise de contact avec la Convention Baptiste du Sud), il développa de persévérants efforts en direction des fondamentalistes du Nord dans le cadre de la Bible Union présidée par T.T. Shields. En 1927 enfin, un comité auxiliaire américain permettait à l’Association de sortir de son isolement, sinon de sa précarité financière. Sa méthode était de prendre contact avec les communautés baptistes ou évangéliques francophones expatriées aux États-Unis.

 

L’organisation intérieure posa moins de problèmes. Dès la Conférence constitutive de Montbéliard début novembre 1923 les statuts de l’Association furent entérinés. Les six Églises fondatrices étaient celles de La Chaux-de-Fonds, Tramelan, Court, Colombes, Nîmes, Paris Bonne Nouvelle. Robert Dubarry sut s’entourer de collaborateurs fiables, dont Georges Guyot. Les deux hommes étaient très différents de caractère, mais finirent par former un « couple d’aspect frères siamois ». Comptable de formation, Georges Guyot exerça longtemps  le métier de banquier à un haut niveau de responsabilité, puis fut le trésorier de l’Association pendant plus de trente ans, et le responsable du Lien Fraternel, l’organe de l’Association.

Les grandes difficultés financières des débuts excluaient la possibilité d’une expansion missionnaire rapide en l’absence totale de fonds propres. L’Association, dans l’entre-deux guerres, se consacra judicieusement  à la seule priorité à sa portée : la consolidation de l’existant, l’effort tourné vers le progrès interne, l’aspect qualitatif de la progression chrétienne, en un mot la sanctification. En fait, l’impulsion donnée par Robert Dubarry s’inscrivait tout naturellement dans la continuité des directions tracées par le couple Saillens à l’époque de leur étroite collaboration : la recherche du Réveil, et surtout l’approfondissement de la foi, l’évangélisation progressive des membres, comme préalable à une extension numérique.  On sent là la parenté avec l’esprit des Conventions de Chexbres et de Morges, et peut-être plus particulièrement avec ce thème qui tenait particulièrement à cœur à Jeanne Saillens, celui du « total surrender » (l’abandon total).

De fait, les Églises membres ne connurent pas  durant l’entre-deux guerres des progressions numériques spectaculaires. Mais au fil des années et des conférences l’adhésion de nouvelles Églises membres vint renforcer ses effectifs. Dès le Congrès de Montbéliard, trois nouvelles Églises se joignirent aux six fondatrices, deux dans l’environnement immédiat (Montbéliard et Valentigney), la troisième étant celle de Lyon, derrière son pasteur Sagnol, brutalement mis à la retraite par l’ex-Union Baptiste, mais partant pour une nouvelle expérience. L’année suivante, le renfort de l’Église de Bruxelles portait les rangs de l’AEEBF à dix Églises Baptistes soit 812 membres. A cette date, une moitié des Églises parvenait, au prix de lourds sacrifices de la part de chaque membre à l’autosuffisance financière. L’année suivante s’ajouta l’Église belge de Croix, et encore, en 1933, celles de Paris rue de Sèvres et de Granges dans le Jura bernois (mais aussi le départ de celle de La-Chaux-de-Fonds pour virage pentecôtisant), puis en 1937, en Suisse, Bienne et Malleray.

 

Ainsi à la veille du Second Conflit Mondial, l’Association avait réussi à se poser, bien qu’en nette minorité numérique, face à la Fédération Baptiste, dans la position alternative d’un baptisme fondamentaliste militant, non-œcuménique, « laboratoire » d’un modèle de vie chrétienne insistant sur l’aspect qualitatif de la progression chrétienne.

En parallèle, elle resserrait les liens de R. Dubarry  avec les fondamentalistes américains dans la mouvance de T.T.Shieds, et canadiens  du Toronto Baptist Seminary, notamment par des envois d’étudiants francophones permettant d’assurer une formation précieuse en langue française (en vue d’une action au Québec) contre une formation théologique offerte par le Baptist Seminary. Ainsi fut dépêché Frédéric Bühler, jeune baptiste Alsacien qui à l’issue de son cursus effectua en 1937 et 1938 un vaste voyage de députation au service de l’Association, visitant bon nombre d’Églises Baptistes fondamentalistes tant au Canada qu’aux États-Unis, obtenant des Baptist Regular Churches canadiennes un soutien financier régulier fort opportun. Il fut suivi d’autres, dans les années 1940, 1950 et au-delà,  destinés à devenir des pasteurs remarquables de l’Association : William-Henri Frey, Guy Appéré, Etienne et Doris Huser, Louis Grosrenaud.

L’option fondamentaliste modérée de l’AEEBF se doubla d’une vive méfiance pour l’action sociale organisée (reprochée par ailleurs par les fondamentalistes américains, et aux Baptistes de la FEEBF) et du rejet du pentecôtisme.

 

Il est délicat de détailler la période de la Seconde guerre Mondiale et en particulier de l’Occupation qui n’a guère donné lieu à des archives dans le mouvement baptiste. Les difficultés pour assurer la subsistance (et la  rareté du papier !) ont mobilisé (c’est-à-dire immobilisé !) les énergies des chrétiens comme ce fut le cas pour leurs contemporains. Les baptistes en général ont fourni un contingent conséquent à la Résistance, mais je ne sais pas quel fut alors l’engagement des églises de l’Association, et singulièrement de Robert Dubarry sur ce point. La proximité géographique et fraternelle avec les églises de Suisse romande suggère la possibilité d’aide à des réseaux pour mettre hors de danger des juifs, mais c’est là de ma part pure supposition.

 

7 – De l’après-guerre aux dernières années (1945 – 1970) :

 

Au point de vue des orientations de l’Association Baptiste, l’après-guerre confirma les positions prises précédemment, en particulier la méfiance signalée plus haut pour l’organisation par les églises de l’action sociale. Cette méfiance pour le « social » répondait selon Sébastien Fath à différents arrière-plans : d’une part, elle exprimait une vieille sensibilité piétiste de retrait du monde (les membres étaient plus souvent d’origine protestante que ceux des églises de la FEEBF) ; et était adaptée à la composition sociale des églises, moins ouvrières que celles du Nord, d’autre part elle rejoignait les vitupérations, de ceux, aux USA, contre les modernistes, accusés de vouloir substituer l’action sociale à l’évangélisation. Il se traduisit par le « rejet de tout ce qui pourrait faire de l’Esprit un instrument au service de l’homme. ».

 

Dans le domaine des relations inter-baptistes, la situation évolua dans le sens d’une détente, d’une normalisation, de nature à conforter Robert Dubarry dans ses dispositions naturelles à la diplomatie et à la négociation. Des pas essentiels furent franchis par les protagonistes des camps naguère les plus opposés. Henri Vincent, le fils de Philémon Vincent, du côté de la Fédération, fit tous ses efforts pour pacifier les relations avec les Baptistes Indépendants du nouveau Tabernacle reconstruit et récemment inauguré, invitant le pasteur Jacques Blocher à venir prêcher dans son église. Du côté de Robert Dubarry ; plusieurs courriers échangés entre lui et Madame Arthur Blocher consolidèrent le sentiment de solidarité inter-baptiste qui, sans aller jusqu’à l’idée d’une fusion entre l’Alliance et le Tabernacle, développa un climat de détente que les années cinquante ne firent qu’accentuer.

 

Au plan international, les relations fructueuses entre l’Association Baptiste et les Baptists Mid Missions américaines, bénéficiant du même climat, évitèrent aux nouvelles églises fondamentalistes du début des années cinquante de tomber dans le piège qu’on pouvait redouter d’une dérive isolationniste qui eût pu les faire qualifier de « sectaires ».

L’après-guerre vit aussi rapidement, dès 1947, la reprise des Conférences de l’Association Baptiste, qui duraient cinq ou six jours, toujours sous l’égide de Robert Dubarry, naturellement, à Nîmes, puis, en 1949,  à Court et en 1951 à Tramelan. Elles réaffirment sans surprise l’identité fondamentaliste de l’Association. La discipline d’évangélisation est maintenue, mais l’accent est mis plus que jamais sur le qualitatif. En somme, la ligne de toujours de Robert Dubarry.

La seconde moitié du vingtième siècle conforta le mouvement d’union collaborative du baptisme français et du mouvement évangélique français et européen en  général dans l’effort qui allait être la grande affaire de toutes ces années, les grandes campagnes d’évangélisation destinées à les  faire émerger du ghetto ultra minoritaire où ils étaient enfermés, au premier chef les campagnes de Billy Graham, suivies par d’autres. Robert Dubarry ne pouvait manquer d’y jouer son rôle, certain bien qu’il ne fût pas le plus visible.

Ici mes sources me font défaut pour détailler les dernières années du ministère de Robert Dubarry. Il prend sa retraite en 1966, et s’éteint paisiblement en 1970.